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Agroalimentaire : Vers l’instauration d’un code de bonnes pratiques ?

9 mars 2021 | Par Sophie Ginoux

Depuis août dernier, sept associations représentant la quasi-totalité de l’industrie de production et de transformation canadienne font front commun pour pousser Ottawa et les provinces à imposer un code de conduite aux détaillants. Les relations entre ces derniers et leurs fournisseurs n’ont jamais été aussi tendues en raison de frais et de pressions multiples imposées par cinq grands joueurs, qui détiennent à eux seuls 80% du marché : Loblaw (Provigo et Maxi), Sobeys (IGA), Metro, Walmart et Costco.

Ce manque de concurrence leur permet semble-t-il d’exiger des multinationales, mais aussi des transformateurs régionaux et des milliers de fermes familiales qui les fournissent, des paiements et des contributions exagérées. Ces charges sont de tout ordre : achat à rabais ou à perte dans le cadre d’offres spéciales aux consommateurs, promotion, accès aux tablettes, retards de livraison, mauvaises prédictions concernant la demande, etc. Il leur est aussi demandé de régler des frais de déchargement de leurs marchandises, de dédommagement en cas de bris dans les magasins ainsi que de participation aux rénovations structurelles des chaînes d’alimentation.

L’association des Produits alimentaires et de consommation du Canada (PACC), qui regroupe une centaine d’entreprises dont Lassonde, Campbell’s, Cascades, Catelli, Dare, Hershey’s, KraftHeinz et McCain, a d’ailleurs calculé en 2020 qu’en l’espace de quatre ans les frais et les pénalités imposés par les grands détaillants avaient bondi de 22%. Une difficile marge de manœuvre à gérer pour des fournisseurs, même lorsque leurs entreprises et leurs marques de commerce sont bien implantées. De plus, les grandes chaînes de détail fragilisent l’industrie agroalimentaire en rechignant à accepter des hausses de prix des produits, même lorsque celui de certains ingrédients ou matières premières augmente subitement, et mettent semble-t-il des mois pour rembourser des erreurs de facturation.

L’exemple britannique

La patience des fournisseurs s’est épuisée à l’été 2020, lorsque Walmart a décidé de leur faire payer une partie de ses investissements de 3,5 milliards dans son réseau de magasins et son infrastructure de vente en ligne, en amputant de 1,25% ou 6,25% les sommes qui leur seraient remises pour leurs produits. Le collectif formé par sept grandes associations de producteurs et de transformateurs (PACC, Aliments et boisson Canada, Association canadienne des boissons, Association des transformateurs laitiers du Canada, Association canadienne de la boulangerie, Fédération canadienne de l’agriculture et Conseil canadien de l’horticulture) demande donc à présent au gouvernement fédéral et aux provinces d’agir pour restaurer un équilibre dans le milieu agroalimentaire.

Dans un contexte pandémique où il est de plus en plus question d’autonomie et d’innovations dans le secteur alimentaire, les fournisseurs proposent de s’inspirer de pays comme le Royaume-Uni, l’Irlande et l’Australie, qui ont légiféré pour réguler les pratiques en matière de frais et de prix. D’autres états, dont l’Allemagne, le Japon et la Bulgarie sont actuellement engagés dans un processus similaire pour éviter des abus sur un marché que l’on sait dorénavant beaucoup plus fragile qu’on ne le croyait. Est-ce que le Canada suivra cette tendance ? Les prochains mois seront décisifs.

Source : La Presse

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